vendredi 8 janvier 2016

Zéro phyto : un enjeu fédérateur



Plus qu'une évolution, le passage au zéro phyto appelle à des changements de points de vue, de pratiques, à d'autres relations à l'espace public et entre les acteurs et les usagers de cet espace. Les enjeux de ce nouveau paradigme végétal, les leviers pour le mettre en œuvre, les freins prévisibles ou rencontrés, ont animé les débats et les démonstrations de la journée Ecophyto « zéro phyto, l'urgence d'agir » organisée par le CFPPA des Pays d'Aude.

 




Supprimer l'utilisation des produits phytosanitaires réclame une volonté politique pour transformer l'environnement de proximité. Il faut convaincre, communiquer, vaincre les réticences réelles ou présumées, chambouler des notions esthétiques telles que le beau ou le propre. Le pari est loin d'être impossible, l'exemple de la ville de Narbonne exposé par Anthony Barrais du service Espaces Verts le montre, le témoignage des représentants de la ville de Foix présents à la journée Ecophyto également. Le retour de la végétation dans cette agglomération a amené un retour de la biodiversité accueilli favorablement par la population. La gestion des espaces est différenciée pour tenir compte à la fois des usages et des difficultés d'entretien. Des formations ont été organisées pour les personnels, la communication en direction des habitants a été soignée en utilisant le bulletin municipal ou des panneaux lumineux. Pour réussir, l'enjeu du zéro phyto se doit d'être partagé. Il implique une réflexion sur les destinations des espaces publics, un regard urbaniste, technique et social. Quels végétaux pour quels lieux, quel type d'entretien, quelles attentes de la population ? Pour les espaces de prestige, pour la voirie, pour les espaces d'agrément, le choix des aménagements paysagers, des revêtements et des techniques d'entretien sera différent. Avec le zéro phyto, la réflexion partagée sur l'espace public est ravivée. 




Elle s'accompagne d'une modification des techniques, des matériels, source d'innovation mais aussi d'évolution des métiers et des compétences. Pour les collectivités territoriales, il est nécessaire de trouver des solutions économes pour ne pas gréver les budgets. Les aides de l'Agence de l'eau, la mise à disposition de végétaux et d'espaces témoins par le Département de l'Aude, les initiatives de l'Agglomération de Carcassonne, la table ronde a permis de voir quelques exemples d'accompagnement menés par les acteurs publics du développement durable. Hervé Loussert du SRAL a rappelé le travail de mobilisation dans le département pour améliorer la qualité de l'eau et réduire de façon significative l'utilisation des produits phytosanitaires dans les espaces publics mais aussi dans le secteur agricole. Les enjeux réglementaires sont selon lui autant de leviers pour les collectivités locales. Sylvie Setzkorn, du Département de l'Aude a montré comment les PAPPH, plans d'amélioration des pratiques phytosanitaires et horticoles, structurent les politiques et pratiques locales. Les efforts réalisés sont reconnus dans le cadre du label Terre Saine, un atout pour les communes qui peuvent ainsi afficher leur engagement. Ils contribuent à l'amélioration de la qualité de la ressource en eau ; un enjeu majeur dans le contexte audois a démontré Lorie Vacquier de Carcassonne Agglo.



Sur le territoire, l'enseignement agricole est particulièrement actif pour accompagner les collectivités territoriales. Des expérimentations sont menées par les exploitations des établissement comme c'est le cas au lycée Charlemagne, des formations sont proposées par le réseau des CFPPA à destination des employés des collectivités territoriales et des jardiniers amateurs. Partout en France, les établissements d'enseignement agricole se mobilisent dans le cadre de leurs missions d'enseignement mais également d'expérimentation et de contribution au développement territorial. Le réseau Eau les fédèrent. L'organisation de la journée Ecophyto s'est nourrie du travail d'études mené par un groupe d'étudiants ingénieurs de Supagro-Montpellier sur les freins et leviers pour le passage au zéro phyto. Leurs préconisations ciblent un travail d'accompagnement et de formation des élus locaux et des services espaces verts avec des temps communs pour améliorer la communication entre ces deux types d'acteurs.



Présentation des étudiants de Supagro
Car, au-delà des techniques, au-delà de choix paysagers et urbains, le zéro phyto est bel et bien un enjeu à partager sans modération pour que les solutions engagées soient progressives et pérennes. Il visite les différents volets de la politique publique locale et en premier lieu le développement territorial. Pour les communes, entretenir autrement les espaces, nécessite de trouver des moyens et des outils nouveaux. Certaines choisissent de mobiliser des ESAT (établissements d'aide et de service par le travail) pour favoriser l'insertion des personnes en situation de handicap. D'autres de mutualiser les matériels et machines. Pour les villages, la solution du groupement d'employeurs en partageant des emplois avec d'autres secteurs tels que l'agriculture est également une voie à explorer.

La journée Ecophyto « vers le zéro phyto, l'urgence d'agir » a révélé l'envie d'agir en fédérant les acteurs pour que l'espace public soit beau au naturel. Et derrière cet objectif environnemental se profile une vision englobant les différents enjeux d'un mieux vivre au niveau local.

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